mardi 20 mars 2018

La vieille dame dans le silence des forêts


Il est toujours bon de doucher l’optimisme (de moins en moins béat, il faut le reconnaître) de celles et ceux qui trouvent notre organisation sociale toujours « vivable ». Activité qui se révèle moins ardue qu’auparavant car, avec la raréfaction des espèces et, par là-même, des capacités de survie de l’humanité, se raréfient les arguments, régurgités ad libitum après le journal vespéral, contre notre juste critique du "Progrès". 

Nous avons noté ainsi à quel point la dégradation générale de nos conditions d’existence rend sa banale évidence aux plus radicales de nos constatations. D’aucuns auront noté que si, hélas, les consciences ne se radicalisent pas et si l’énergie employée au déni atteint des proportions impressionnantes, le réel, avec toute la violence dont nous le savons capable, se radicalise, lui, à une vitesse littéralement folle. Il ne sera bientôt plus la peine d'élaborer, face aux thuriféraires de nos démocraties de marchés, un discours argumenté sur la catastrophe présente : il suffira de désigner simplement chacune de ses manifestations et cette sinistre propagande par le fait rythmera ces constatations, chaque fois plus nombreuses, du son de sa marche funèbre. 

Ce matin, ainsi, on mentionnera ces vieilles femmes japonaises, esseulées, abandonnées et si pauvres qu’elles n’ont plus d’autres ressources que de commettre un nombre suffisant de larcins pour aller en prison - ultime refuge dans cet étrange avant poste du capitalisme qu'est le Japon -, où elles trouvent nourriture, chauffage et compagnie. On rappellera aussi, sans prendre la peine d’indiquer l’évidence du lien, qu’un tiers des oiseaux de nos campagnes a disparu depuis la fin des années 2000 et que le rythme de cette disparition ne cesse de s’accélérer depuis deux ans. Le silence des bois sera alors le nôtre.